L’infraction du vol en entreprise par un salarié n’est pas un fait inconnu aux managers ou aux chefs d’équipes. Il arrive que le salarié détourne des sommes qu’il doit encaisser pour le compte de son employeur ou des biens qui ne lui appartiennent pas. En droit du travail, il faut toujours agir en prenant des précautions et surtout en suivant des règles précises. Comment donc réagir face au vol et surtout quelle sanction ?
Sommaire
- 1 Engager la responsabilité civile du salarié fautif
- 2 Que dit le juge sur la faute lourde en cas de vol par le salarié ?
- 3 Faire recours au juge pénal dans le cas d’un vol en entreprise par un salarié
- 4 Quelle réaction avoir devant un vol en entreprise du salarié ?
- 5 Pourquoi faire une enquête ?
- 6 Suivre minutieusement la procédure de licenciement
- 7 Que retenir sur les actions nécessaires après un vol en entreprise ?
Engager la responsabilité civile du salarié fautif
Le vol en entreprise est très répandu.
Selon un sociologue (François Bonnet, chercheur au CNRS) qui a étudié la question, le vol en entreprise est une activité routinière qui concerne au moins 1 employé sur 3.
Les chefs d’entreprises ont généralement une première réaction commune. Lorsqu’ils constatent le vol en entreprise par un salarié, ils attaquent le travailleur au pénal et engagent sa responsabilité civile. Pourtant, une telle démarche n’est pas la meilleure réaction à avoir. Pour obtenir des dommages et intérêts, l’employeur doit démontrer la faute lourde du salarié. La faute lourde signifie que le travailleur a soustrait la chose d’autrui dans le but de nuire à son employeur. C’est en effet l’intention de nuire qui permet de caractériser dans le cas d’espèce le préjudice à réparer. Sans cet élément qu’est l’intentionnalité, la faute du salarié fautif ne peut être lourde au sens de la loi. Sur ce problème de droit, la jurisprudence s’est longuement prononcée.
Que dit le juge sur la faute lourde en cas de vol par le salarié ?
Dans une décision du 6 juillet 1999, la Cour de cassation a retenu que le délit de vol comporte nécessairement un élément intentionnel. Mais, cet élément intentionnel n’implique pas de facto une volonté de nuire à l’employeur. Il est d’ailleurs difficile pour les employeurs de démontrer la volonté de nuire de la part du salarié. Cependant, si l’objectif de causer un préjudice est prouvé, il y a des conséquences qu’il faut retenir :
- La faute lourde s’établit ;
- Le licenciement pour faute lourde ;
- La perte des indemnités de licenciement ;
- La fin de l’immunité civile ;
- Le paiement par le salarié de dommages et intérêts.
Ainsi, la faute lourde dans le cas du vol entraîne de nombreuses conséquences. C’est pour cette raison que le juge ne la reconnaît que dans des cas exceptionnels. Mais, en plus de la responsabilité civile, l’employeur peut engager une action pénale.
Faire recours au juge pénal dans le cas d’un vol en entreprise par un salarié
La responsabilité pénale ne s’engage que lorsqu’il y a commission d’infraction. La poursuite n’est alors possible que si la définition de l’infraction présumée commise correspond à celle du Code pénal. Au sens du droit criminel, le vol est la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui. Ainsi, la soustraction d’une chose qui n’est pas frauduleuse ne peut pas être poursuivie comme un vol. Il faut toutefois retenir que la poursuite pénale est un très bon moyen de combattre le vol en entreprise. Cependant, la décision du juge pénal peut avoir une incidence sur le motif du licenciement.
Le juge pénal et le licenciement pour vol : quel rapport ?
En cas de vol, les chefs d’entreprises enclenchent généralement une procédure de licenciement pour motif de vol. C’est une action très légitime. Cependant, il peut arriver que le juge pénal ne reconnaisse pas le vol. Dans la qualification de l’infraction commise par le salarié, le juge pénal peut établir une escroquerie au lieu d’établir un vol. Dans ce cas de figure, le licenciement pour vol est contestable devant le conseil de prud’hommes. A contrario, si la condamnation intervient pour vol, le licenciement ne peut être remis en cause. Le conseil de prud’hommes ne pourra qu’apprécier la gravité de la faute. C’est la raison pour laquelle certains conseils juridiques conseillent de mettre en mouvement l’action pénale avant l’action civile. Cette précaution n’empêche pas l’enclenchement d’une procédure disciplinaire.
Quelle réaction avoir devant un vol en entreprise du salarié ?
La réaction à avoir dépend de l’objet ou du bien que le salarié a frauduleusement soustrait. Dans un arrêt du 19 novembre 2002, la Cour de cassation a retenu que si le vol consiste en un détournement d’une somme d’argent, il faut aller sur le terrain de l’exécution du contrat de travail. Le salarié qui encaisse de l’argent pour son compte alors qu’il devait l’encaisser pour son employeur doit restituer la somme d’argent frauduleusement soustraite. Quel que soit le bien concerné par le vol, il faut toujours suivre des étapes :
- Faire une enquête ;
- Convoquer le salarié pour un entretien préalable ;
- Décider d’une mise à pied à titre conservatoire ;
- Faire tenir l’entretien ;
- Adresser la lettre de licenciement (si la faute est établie).
Pourquoi faire une enquête ?
Le vol est une infraction pénale. Dans la procédure pénale, il faut apporter les preuves de ce que l’on avance. La preuve est la rançon du droit. Faire une enquête permet à l’employeur de rassembler les preuves. Parfois, il peut simplement s’agir de doutes à cause du comportement de l’employé. Pour l’enquête, contacter des détectives privées est une solution efficace. Après la phase d’enquête, les doutes peuvent se confirmer. Les preuves doivent simplement permettre d’établir sans aucun doute raisonnable la soustraction frauduleuse. Les preuves peuvent être :
- Des rapports de la banque ;
- Des rapprochements bancaires incohérents ;
- Un témoignage fiable ;
- Des éléments multimédias (images, vidéo, bandes sonores) établissant le flagrant délit…
Il peut arriver que le salarié soit appréhendé en flagrant délit. Le flagrant délit concerne la situation dans laquelle le salarié fautif est surpris alors qu’il commet l’infraction. Il s’établit aussi lorsque l’on retrouve le voleur en possession du bien volé.
Suivre minutieusement la procédure de licenciement
En droit du licenciement, les règles procédurales sont d’ordre public. Que le vol constitue une faute grave ou une faute lourde, l’employeur doit respecter les étapes suscitées. Elles constituent des prescriptions légales contenues dans le Code du travail. Lorsque l’employeur constate l’infraction de vol, il dispose d’un délai de 2 mois pour enclencher la procédure disciplinaire. Cette procédure disciplinaire commence par la convocation à un entretien préalable. Cette convocation peut être doublée d’une mise à pied qui n’est pas obligatoire. La sanction d’un vol en entreprise par le salarié n’est pas toujours le licenciement. L’employeur peut choisir d’être clément et se limiter à une mise à pied. Mais, s’il doit y avoir licenciement, il faut respecter certaines mentions obligatoires. Dans la lettre de licenciement, l’employeur doit rappeler :
- Le poste de travail et les missions du salarié ;
- L’identification du salarié ;
- Les faits ;
- Le motif du licenciement.
Enclencher une procédure disciplinaire est souvent plus facile à gérer que les procédures relatives aux responsabilités civile et pénale.
Que retenir sur les actions nécessaires après un vol en entreprise ?
Dans tous les cas, il est important de faire appel à un enquêteur professionnel pour avoir des preuves fiables du vol. L’employeur qui établit le vol en entreprise par un salarié peut décider d’engager une action civile et une action pénale. L’action pénale vise à condamner le salarié tandis que l’action civile se solde généralement par le paiement de dommages et intérêts. Ces deux actions sont cependant un peu complexes. L’employeur peut aussi enclencher une procédure disciplinaire qui aboutira à une sanction comme le licenciement. Dans ce cadre, il faut respecter les prescriptions du Code du travail en matière de licenciement. Par ailleurs, le vol ne constitue pas toujours une faute lourde. Le vol est une faute lourde lorsque le salarié par ce forfait cherche à nuire à l’employeur. Si cette volonté de nuire n’est pas prouvée, le vol en entreprise est simplement une faute grave. Le licenciement pour ce type de vol n’empêche donc pas le salarié de percevoir les indemnités.
Sources :
https://www.captaincontrat.com/articles-droit-social/responsabilite-du-salarie-pour-vol-une-fausse-bonne-piste
https://droit-finances.commentcamarche.com/faq/563-vol-au-travail-sanction-et-responsabilite
https://www.franceinter.fr/emissions/l-eco-du-matin/l-eco-du-matin-24-fevrier-2016